INTRODUCTION

Morteza, jeune Afghan de l’ethnie Hazara, avait 11 ans lorsqu’il s’est retrouvé seul sur la route de l’exil [1]. Prise au piège dans une embuscade à la frontière irano-turque, la famille n’a eu d’autre choix que de rebrousser chemin alors que l’enfant parvenait à déjouer l’attention des gardes-frontières et à poursuivre sa route. Recueilli par des membres de sa communauté, il affronte sans les siens de douloureuses étapes avant de pouvoir s’établir en Suisse comme réfugié mineur non accompagné [2].

Quelques années plus tard, l’auteure rencontre par hasard la famille de Morteza dans un camp de réfugié·e·s sur l’île de Chios, en Grèce. Lorsque les parents lui confient avoir un fils en Suisse, elle adopte une position d’intermédiaire qui permet à la famille de retisser des liens, puis d’entamer une procédure de regroupement familial. La famille vit aujourd’hui réunie en Suisse.

L’album Hasan venu d’ailleurs s’inspire très librement de l’histoire de Morteza, mais également de celles de dizaines d’autres au parcours similaire. Un parcours qui confronte ces enfants durant des mois, des années parfois, à des réalités d’une violence extrême : la fuite pour survivre, les routes migratoires parcourues à pied des heures durant pour trouver un refuge, la traversée de la mer pour rejoindre l’Europe sur des embarcations de fortune, la vie dans des camps de réfugié·e·s, dans des conditions d’une extrême précarité, sans que les droits de l’enfant soient pris en compte.

Délibérément, le pays d’origine d’Hasan n’a pas été nommé. Le prénom de l’enfant a été choisi de façon à ne pas identifier sa nationalité ; il est porté dans de nombreuses cultures (Afghanistan, Iran, Syrie – et autres pays arabes – Turquie, Albanie...). Seule la petite phrase écrite en farsi sur le dessin réalisé au terme de l’histoire permet de situer son origine en Iran ou en Afghanistan. Ce choix délibéré a pour objectif de permettre à chacun·e de relier cette histoire à celle de personnes réfugiées rencontrées durant leur existence, celle de leur famille, et peut-être de l’inscrire aussi dans la dynamique migratoire qui s’observe à l’échelle planétaire. Les difficultés vécues par cet enfant sont similaires à celles vécues par de nombreux autres, quel que soit leur origine ou leur parcours.

L’objectif de cet ouvrage est de sensibiliser le public au parcours difficile d’un·e réfugié·e, et de mieux saisir les conséquences que cela peut avoir sur l’intégration dans un nouvel environnement. Si l’on parle aujourd’hui beaucoup des réfugié·e·s venu·e·s d’Ukraine, si une grande solidarité s’est déployée au niveau étatique et populaire pour leur offrir un accueil de qualité, force est de constater que d’autres populations réfugiées ne bénéficient pas des mêmes avantages.

Puisse Hasan venu d’ailleurs éveiller les consciences, permettre à chaque réfugié·e d’être accueilli·e dignement, et éveiller une curiosité à découvrir l’Autre dans toute sa richesse.

L’ALBUM

Lors d’un orage particulièrement violent, alors qu’Hasan vient d’arriver dans son pays d’accueil, il se réfugie sous une table. Loin d’imaginer que les coups de tonnerre réactivent le traumatisme des bombes qui ont détruit la ville de l’enfant, ses camarades se moquent de lui. Hasan est vraiment étrange… Il ne sait pas lire, pas écrire, il mange avec ses doigts, il se cache même sous une table.

Seul le narrateur (ou est-ce une narratrice ?) perçoit la tristesse d’Hasan et lui offre ainsi la possibilité de raconter son histoire. Les confidences partagées permettront au groupe de percevoir différemment cet enfant venu d’ailleurs, de le reconnaître comme individu à part entière, riche de ses expériences, et de mesurer la responsabilité qui est leur pour favoriser une intégration de qualité.

L’AUTEURE

Mary Wenker est pédagogue curative.

Auteure de nombreux supports pédagogiques destinés à faciliter et à encourager le respect de la diversité, elle partage désormais sa vie entre la Suisse (à Fribourg, où elle travaille comme thérapeute) et la Grèce (où elle est engagée depuis 2016 comme bénévole pour soutenir les populations réfugiées).

L’ILLUSTRATRICE

Amélie Buri est illustratrice freelance.

Elle réalise des mandats pour une large clientèle (institutions, hôpitaux, communes vaudoises, presse, entreprises, particuliers) et a signé une dizaine d’albums pour enfants. Ses origines plurielles, ses nombreux voyages et ses engagements à l’étranger l’ont elle aussi sensibilisée à la diversité et au besoin de chacun·e d’être reconnu·e dans son intégrité. Amélie Buri vit et travaille dans le canton de Vaud, en Suisse.

LEUR COLLABORATION

Mary Wenker et Amélie Buri présentent ici leur second album. Le premier, Camille aux papillons (Éditions LEP, 2021), aborde avec finesse la question d’identité de genre et plus largement le respect de la différence.


NOTES

[1] https://asile.ch/2020/04/01/choosehumanity-entre-la-grece-et-la-suisse-une-famille-separee-par-des-frontieres-injustes/

[2] Selon la loi suisse, un mineur non accompagné (MNA) est un jeune migrant qui a moins de 18 ans et n’est pas accompagné d’un adulte responsable de lui selon la loi ou la coutume de son pays d’origine.

 

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